La dystonie est à la fois un symptôme et le nom d'un
groupe de maladies, appelées dystonies. Le symptôme, ou la manifestation
physique, correspond à des contractions prolongées, involontaires
des muscles d'une ou de plusieurs parties du corps, entraînant
souvent une torsion ou une distorsion de cette partie du corps.
Le trouble est secondaire à un malfonctionnement
du système nerveux central, probablement dans la région correspondant
aux noyaux gris centraux. Dans la dystonie primaire non compliquée,
il n'y a pas d'altération de la conscience, de la sensation
ni de la fonction intellectuelle.
La dystonie peut être accompagnée
de tremblements, faisant parfois penser aux tremblements observés
habituellement chez les personnes âgées, ou de tremblements
secs, irréguliers et saccadés.
li existe plusieurs classifications
de la dystonie, selon la partie du corps atteinte ou selon le
fait que sa cause est inconnue (dystonie primaire ou idiopathique)
ou qu'elle est secondaire à une blessure, à un contact avec
des toxines ou à d'autres maladies du système nerveux central.
Pour l'instant, la classification la plus pratique est la suivante
:
1. Dystonie
idiopathique de torsion (DIT) Dystonie généralisée
Ce type de dystonie
commence typiquement dans une partie spécifique du corps, habituellement
un pied ou une jambe. Après la marche ou une autre forme d'exercice,
on peut noter une inversion du pied chez la personne atteinte
qui marche sur le bord externe de son pied. La dystonie idiopathique
de torsion commence habituellement au cours de l'enfance. Elle
s'étend souvent aux autres parties du corps, y compris le dos,
le cou ou le bras. C'est une maladie héréditaire de transmission
du type autosomique dominant, ou parfois sporadique.
2. Autres
dystonies héréditaires
La dystonie sensible à la dopa est
parfois appelée dystonie de Segawa du nom de celui qui l'a décrite
pour la première fois, le docteur Masaya Segawa au Japon. Le
gène a été découvert en 1994. Typiquement, cette forme de dystonie
se développe chez l'enfant ou le jeune adulte et est souvent
accompagnée d'une certaine rigidité et d'une maladresse faisant
penser à la maladie de Parkinson. Le traitement avec la dopa
peut soulager presque complètement les symptômes. Cet effet
bénéfique de l'agent dure indéfiniment.
La forme de dystonie-parkinsonisme
liée au chromosome X est observée chez les hommes des Philippines.
Elle inclut certaines caractéristiques du parkinsonisme elle
a tendance à s'aggraver et finit par entraîner une invalidité
grave.
3. Dystonie secondaire
Dans ce type de
dystonie, la dystonie est secondaire à des lésions ou à la formation
de cicatrices dans des petites zones du cerveau. Ces troubles
peuvent être dus à un apport réduit d'oxygène avant, pendant
ou peu de temps après la naissance (insuffisance motrice cérébrale),
à des lésions cérébrales, en particulier au cours de l'enfance,
ou à de légers accidents cérébrovasculaires. La dystonie peut
également être secondaire à de légères atteintes liées à la
sclérose en plaques, secondaire à une encéphalite ou secondaire
à un grand nombre d'autres maladies affectant le système nerveux,
y compris la maladie de Wilson (dégénérescence hépatolenticulaire).
4. Dystonies
en foyer
- Le blépharospasme est un problème des muscles
des paupières, qui entraîne la fermeture de ces dernières.
Les spasmes peuvent devenir suffisamment fréquents pour empêcher
le sujet de bien voir, bien que ses yeux et sa vision soient
normaux. D'autres muscles du visage peuvent également être
atteints, entraînant des grimaces ou d'autres distorsions
faciales.
- La dystonie
cervicale (torticolis spasmodique) atteint les muscles du
cou et des épaules. Les spasmes musculaires forcent le cou
à se pencher d'un côté (torticolis), vers l'avant (anticolis)
ou vers l'arrière (rétrocolis). Le cou peut se contracter,
tourner, présenter des secousses ou être bloqué de façon prolongée
dans une seule direction.
- La dystonie
oromandibulaire est parfois appelée syndrome
de Meige. Les muscles du bas du visage se contractent de façon
irrégulière. Parfois, les muscles de la mâchoire qui permettent
d'ouvrir ou de fermer la bouche font des mouvements involontaires.
Ce problème est habituellement associé à un blépharospasme.
- La dysphonie
spasmodique (dystonie laryngée) porte sur les muscles à
l'intérieur du larynx. Dans la dysphonie spasmodique des muscles
adducteurs, les cordes vocales se rapprochent de très près,
en particulier quand le sujet essaie de parler. La voix est
forcée, rauque et n'est parfois qu'un murmure. Le sujet a
parfois du mal à respirer. Dans la dysphonie spasmodique des
muscles abducteurs, une forme de dysphonie moins fréquente,
les cordes vocales sont maintenues bien à l'écart les unes
des autres la voix est basse et essoufflée. Parfois, la personne
atteinte ne peut plus parler du tout.
- La crampe de
l'écrivain est une dystonie de fonction de la main,
dans laquelle les muscles de la main et de l'avant-bras se
contractent quand la personne veut écrire. La main peut être
si contractée autour du stylo qu'elle ne peut pas bouger.
Dès qu'on enlève le stylo de la main, celle-ci se détend.
Une crampe similaire peut se développer chez le violoniste
quand il utilise son archet ou chez le joueur de flûte qui
déplace certains doigts le long de sa flûte.
- Le spasme hémifacial n'est pas à proprement parler une forme
de dystonie. Dans ce trouble, les muscles d'un côté du visage
se contractent de façon irrégulière. Ce problème est parfois
secondaire à une inflammation ou à une lésion du nerf facial.
Que se passe-t-il
en cas de dystonie?
Le mouvement de
tension ou de torsion des muscles dans la dystonie est dû à
des troubles fonctionnels du système nerveux central. Il est
fort probable que la région clé du cerveau qui est atteinte
est le groupe de noyaux gris centraux, qui correspondent à plusieurs
structures reliées les uns aux autres au centre du cerveau.
Quand la dystonie
est secondaire à certaines lésions ou à de légers accidents
cérébrovasculaires, on retrouve souvent des lésions (zones endommagées)
au niveau du putamen, un des noyaux gris centraux, ainsi que
dans certaines structures proches. On peut observer ces changements
au niveau du putamen à l'aide de l'imagerie par résonance magnétique
et de la tomographie et, à l'autopsie, par examen microscopique
du putamen et des structures apparentées.
Même si nous ne
pouvons pas observer d'anomalies microscopiques du cerveau dans
la grande majorité des cas de dystonie, y compris dans les cas
de dystonie généralisée, l'évidence est si claire dans les dystonies
secondaires que nous pensons que la même partie du cerveau est
atteinte dans tous les types de dystonie. Comme on n'observe
pas de changements anatomiques dans ces formes de dystonie autres
que secondaires, nous devons conclure que ce trouble fonctionnel
est d'origine chimique. Nous ignorons pour l'instant toutefois
la nature spécifique du trouble fonctionnel chimique.
Si, dans la plupart
des cas de dystonie, le principal trouble se révélait être de
nature chimique, cela aurait des répercussions importantes sur
le traitement. En effet, on pourrait alors remplacer le produit
chimique déficient ou bloquer certains échanges à médiation
chimique entre les cellules nerveuses.
Peut-on anticiper
l'évolution de la dystonie?
On ne peut pas
anticiper de façon certaine la progression d'une dystonie. Si
la dystonie atteint plusieurs membres d'une famille ou si elle
se développe au cours de l'enfance, nous pouvons dire qu'elle
aura tendance à s'aggraver avec le temps. Mais, même dans ces
cas, il y a des exceptions où la progression de la maladie non
seulement semble s'arrêter mais où il y a en fait une inversion
partielle ou complète. Ces cas sont rares, mais ils nous incitent
certainement à garder espoir.
Si le trouble apparaît
au cours de l'enfance et est secondaire à une insuffisance motrice
cérébrale ou à une autre atteinte cérébrale survenue aux alentours
de la naissance, la dystonie a tendance à rester stable pendant
de nombreuses années.
Si la dystonie
se développe à l'âge adulte, il s'agit habituellement d'une
dystonie en foyer qui a tendance à rester limitée à cette partie
du corps.
La dystonie est-elle
une maladie héréditaire?
Dans bien des cas,
le caractère héréditaire de la dystonie est évident. C'est dans
ce domaine qu'on a réalisé les plus grands progrès dans la connaissance
de la dystonie au cours des dix dernières années. Nous pouvons
maintenant dire que la dystonie est un trouble héréditaire parmi
les familles juives Ashkénazes et dans un certain nombre de
familles non juives. Sa transmission est du type autosomique
dominant avec pénétrance variable.
Dominant veut dire
que chaque enfant d'un parent porteur du gène anormal a un risque
de 50% d'hériter ce gène. Un sujet porteur du gène peut présenter
des signes cliniques de la maladie (pénétrance) ou peut ne pas
présenter de symptômes du tout. La pénétrance dans la population
juive atteinte est d'environ 30%. Dans certaines familles non
juives atteintes de dystonie et étudiées en Grande-Bretagne,
la pénétrance est d'environ 40%. Dans une grande famille non
juive étudiée dans le nord de l'état de New York, la pénétrance
était de l'ordre de 80%.
Un autre aspect
de la dystonie héréditaire est que sa gravité peut être des
plus variables au sein d'une même famille. Une mère peut ainsi
présenter une légère dystonie, alors que l'un de ses enfants
peut présenter une dystonie généralisée sévère et qu'un autre
peut présenter une dystonie non progressive en foyer légère.
Et il est également possible que, dans cette même famille, un
autre enfant soit porteur du gène, bien qu'il ne présente aucun
symptôme, et qu'il le transmette à ses propres enfants.
Une fois qu'on
aura découvert le gène DYT-1 (juif Ashkénaze) (positionné le
long du chromosome 9), l'étape suivante consistera à établir
son rôle, qui concerne probablement la fabrication d'une protéine
altérant la fonction de certaines cellules nerveuses. L'étape
suivante sera alors de découvrir comment remplacer la protéine
manquante le cas échéant ou comment bloquer certaines voies
qui permettent la fabrication d'une trop grande quantité d'une
substance anormale. En plus du gène DYT-1, les travaux de recherche
génétique de la Fondation portent sur d'autres gènes non DYT-1
dont nous connaissons déjà l'existence.
Le diagnostic
de dystonie
La dystonie est
une maladie relativement rare, caractérisée par des mouvements
inhabituels ou des positions anormales, et qui, à ses débuts,
peut être influencée par le stress ou les émotions. De nombreux
médecins n'ont jamais vu de cas de dystonie, même pendant leurs
études de médecine.
Si le lecteur de
cette brochure ou le médecin soupçonne la présence de dystonie
chez un sujet, le mieux est de consulter un neurologue. La plupart
des universités comptent l'un de ces spécialistes des troubles
du mouvement parmi leur personnel.
Pour obtenir une
liste des médecins spécialisés, on peut contacter la Fondation
médicale de recherche pour la dystonie à Chicago ou l'un des
chapitres locaux.
Que faire si le
médecin établit le diagnostic de dystonie?
Si le médecin envisage
la possibilité de dystonie, la première chose à faire est de
passer soigneusement en revue son arbre généalogique et de tenter
d'identifier les membres de la famille qui souffrent de dystonie
en foyer ou généralisée. On notera même le cas le plus léger
de torticolis ou toute forme de tremblements. Ces renseignements
sont utiles pour les examens génétiques.
On envisagera ensuite
le type de traitement qui convient. Dans ces situations, le
neurologue expérimenté dans les dystonies devrait être votre
guide. De nombreux médicaments sont disponibles. L'un ou l'autre
peut se révéler modérément efficace, légèrement efficace ou
complètement inutile. La persistance à essayer les divers médicaments
disponibles peut toutefois finir par se trouver récompensée.
Le traitement médicamenteux
Certains des médicaments
que votre médecin peut envisager de prescrire incluent: Artane
(trihexyphénidyle), Cogentin (benztropine), Valium (diazépam),
Klonopin (clonazépam), Lioresal (baclofen), Tégrétol (carbamazépine),
Sinemet ou Madopar (lévodopa), Parlodel (bromocriptine), Symmetrel
(amantadine).
Les injections
de toxine botulinum
Pour les dystonies
en foyer, y compris le blépharospasme, le syndrome de Meige,
en particulier avec la dystonie cervicale, et la dysphonie spasmodique,
les injections de toxine botulinum représentent un traitement
très utile, en particulier si la dystonie concerne un groupe
limité de muscles.
La toxine botulinum
est produite par la bactérie Clostridium botulinum. L'efficacité
de la toxine semble être due à l'obtention d'un affaiblissement
du muscle suffisant pour réduire le spasme, mais pas pour entraîner
une paralysie. Cet agent agit en bloquant la transmission au
niveau de la jonction neuromusculaire. Les traitements doivent
en général être répétés tous les 3 à 4 mois, et sont assurés
par des médecins expérimentés dans cette approche.
Les interventions
chirurgicales
On peut envisager
une intervention chirurgicale quand le sujet ne répond plus
aux autres traitements, y compris les injections de toxine botulinum
et les divers médicaments. On doit toutefois noter que si l'intervention
chirurgicale peut procurer un certain soulagement, ses effets
peuvent également disparaître avec le temps.
L'intervention
chirurgicale vise à interrompre, à divers niveaux du système
nerveux, les voies responsables pour les mouvements anormaux
du cou. Certaines interventions détruisent de façon intentionnelle
des zones limitées du thalamus (thalamotomie), du pallidum (pallidotomie)
ou d'autres centres profonds du cerveau.
Les autres approches
chirurgicales incluent le sectionnement d'un ou de plusieurs
muscles du cou qui se contractent (résection musculaire), le
sectionnement des nerfs menant aux racines nerveuses profondes
dans le cou, près de la moelle épinière (radicotomie cervicale
antérieure) et l'ablation des nerfs à leur point d'entrée dans
les muscles qui se contractent (dénervation périphérique sélective).
Plusieurs facteurs
peuvent influencer le succès de l'opération. Chaque patient
est unique et les muscles atteints peuvent varier d'un patient
à l'autre. C'est pour cette raison que l'évaluation préopératoire
est importante. De plus, on ne doit envisager l'intervention
chirurgicale que si elle peut être réalisée par un neurochirurgien
expérimenté dans ces interventions.
Que pouvez-vous
faire si vous souffrez de dystonie?
Votre attitude
face à la maladie est l'un des plus importants facteurs dans
la façon dont la dystonie influencera votre vie. Il est tout
à fait normal quand vous découvrez la nature de votre maladie
de traverser plusieurs phases émotionnelles avant d'accepter
la situation.
Il peut être utile
de discuter avec d'autres personnes souffrant de dystonie. La
Fondation maintient à jour une liste de chapitres et des groupes
d'appui locaux. Vous y rencontrerez d'autres personnes qui ont
surmonté les mêmes obstacles que vous rencontrez et qui peuvent
vous aider.
Que fait-on présentement
au sujet de la dystonie?
Il y a de nombreux
travaux de recherche en cours et une grande partie d'entre eux
sont financés par la Fondation médicale de recherche pour la
dystonie. D'autres projets de recherche sont financés par les
National Institutes of Health des États-Unis et dans d'autres
pays.
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